Chers lecteurs,
cette semaine, la CJUE a rendu une décision sur une affaire qui pourrait passer inaperçue parmi les avocats de la consommation recherchant de nouvelles affaires sur le site Web de CVRIA, mais qui a un lien clair avec le droit de la consommation – à savoir, C-100/21 (Groupe Mercedes-Benz) concernant la responsabilité d’un producteur de véhicules « defeat ».
Nous connaissons, bien sûr, le contexte de cette affaire – à savoir le soi-disant « Dieselgate », révélant comment plusieurs constructeurs automobiles avaient modifié leurs véhicules pour tricher aux tests d’émissions. De nombreuses affaires judiciaires sont déjà parvenues à la CJUE, enfin sur la base de la directive sur les ventes aux consommateurs. Cette affaire est similaire à ses prédécesseurs en ce qui concerne les faits, mais aussi différente en termes de base juridique.
Dans Mercedes-Benz, en fait, le fondement de la réclamation du consommateur se trouvait dans le droit allemand de la responsabilité délictuelle (paragraphe 823(2) BGB), qui prévoit un recours en responsabilité délictuelle par les particuliers lorsqu’une loi visant à les protéger a été enfreinte (voir paragraphe 29) . La question que la CJUE devait alors se poser était de savoir si deux instruments européens lus ensemble – à savoir La directive 2007/46 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur (ci-après la «directive-cadre») et le règlement n° 715/2007 régissant la réception de certains véhicules automobiles – devaient être interprétés comme visant à protéger les acheteurs individuels de véhicules automobiles. Selon la juridiction de renvoi, il s’agissait d’un sujet de discorde doctrinale en droit allemand, certains considérant ces instruments techniques comme visant simplement à protéger l’environnement et à garantir la sécurité routière, tandis que d’autres soulignaient la fonction des normes techniques dans la garantie de l’autonomie du consommateur et de l’individu intérêts (voir points 29-30 et ss.
Selon la Cour, il est vrai que les règles européennes examinées visent en fait (également) à protéger les consommateurs individuels : que tel est le cas, selon la Cour (paragraphes 78 et suivants), peut être démontré par le fait que l’encadrement directive oblige les constructeurs à fournir aux acheteurs individuels un certificat attestant que le véhicule acheté est conforme aux exigences fixées par la loi. Les acheteurs de véhicules automobiles munis d’un certificat de conformité peuvent ainsi s’attendre à ce que les véhicules acquis soient conformes à la réglementation en vigueur. Défaut de se conformer est « susceptible, entre autres, de créer une incertitude quant à la possibilité d’immatriculer, de vendre ou de mettre en service ce véhicule et, in fine, de porter préjudice à l’acquéreur d’un véhicule équipé d’un dispositif d’invalidation illicite », ce qui affecte évidemment directement la acheteurs individuels de voitures.
Les États membres sont donc tenus de veiller à ce que les consommateurs individuels disposent d’un recours contre le producteur d’un véhicule d’invalidation, lorsqu’il est prouvé dans une procédure nationale que le véhicule contenait effectivement un mécanisme d’invalidation. Les règles applicables aux actions visant à obtenir réparation du préjudice subi par les particuliers consommateurs ne sont toutefois pas harmonisées ; il appartient aux États membres, sous réserve du respect des principes d’équivalence et d’effectivité, de déterminer les contours exacts des créances. Dans ce contexte, les juridictions nationales sont invitées à apprécier les faits de l’affaire – dans ce contexte, tout en étant chargées de garantir l’effectivité du droit du consommateur à être indemnisé pour tout dommage subi, elles sont également autorisées à examiner des principes tels que l’enrichissement injustifié qui permettrait pour mettre en balance ces dommages avec les avantages éventuels tirés de l’utilisation du véhicule (paragraphes 91-93).
Compte tenu des cas précédents, le résultat dans ce cas n’est peut-être pas trop surprenant; il va, cependant, montrer d’autres manières dont les systèmes nationaux de droit privé et les règles de l’UE entrent progressivement dans des conversations plus directes, donc là où on ne s’y attendrait pas immédiatement. De plus, l’affaire peut intéresser les étudiants et les professeurs de droit comparé de la responsabilité délictuelle, toujours en regardant pour des exemples actuels pour illustrer cette doctrine allemande spécifique :).