Cet article traite du Centre de médiation et d’arbitrage en matière de brevets (PMAC) récemment créé par la Cour unifiée des brevets (UPC). Il répond à certaines préoccupations clés concernant le risque d’inapplicabilité des sentences arbitrales de l’ACGA et propose trois solutions viables.
Depuis le 1er juin 2023, l’accord sur une juridiction unifiée du brevet (accord UPC)) est entrée en vigueur, marquant une étape importante dans la coopération renforcée entre 17 États membres de l’UE. Ce traité international établit un double mécanisme de règlement des litiges liés aux nouveaux brevets européens à effet unitaire et brevets européens classiques. Le système à deux volets comprend le « Tribunal unifié des brevets » (UPC) et le « Centre de médiation et d’arbitrage en matière de brevets » (PMAC).
L’UPC est l’un des deux tribunaux communs existants aux États membres contractants » au sens de l’article 71 du Règlement de Bruxelles 1215/2012 (l’autre étant la Cour de Justice Benelux). Bien que le PMAC soit intégré à l’UPC, il fonctionne en même temps de manière indépendante.
Compétence et application des décisions finales de l’UPC et de l’ACGA
La JUB a compétence exclusive pour connaître des litiges civils concernant les brevets européens à effet unitaire, ainsi que les brevets européens classiques, sauf dérogation du titulaire du brevet pendant la période transitoire de sept ans. Son mandat s’étend au jugement des actions en contrefaçon et en nullité concernant ces deux types de brevets. De même, le PMAC peut administrer des procédures de médiation et d’arbitrage pour les litiges concernant les brevets européens et les brevets européens à effet unitaire.
Conformément à l’article 82 de l’Accord JUB, les décisions et ordonnances de l’UPC sont exécutoires dans tout État contractant à l’Accord JUB, comme s’il s’agissait de décisions ou d’ordonnances de tribunaux nationaux. De même, conformément aux articles 35 et 79 de l’Accord UPC et à la règle 365 du Règlement intérieur de l’UPC, un règlement conclu par l’intermédiaire du PMAC – soit par médiation, soit par arbitrage sous la forme d’une sentence par consentement – est exécutoire en tant qu’ordonnance d’un tribunal national. Cette exécution est réalisée au moyen d’une ordonnance d’exécution annexée au règlement par l’UPC.
Le caractère exécutoire des décisions et ordonnances de l’UPC ne se limite pas aux parties contractantes à l’accord de l’UPC. La reconnaissance et l’exécution des décisions et ordonnances de la JUB dans les États membres de l’UE qui ne sont pas parties contractantes à l’accord JUB sont régies par l’article 71, paragraphe 2, point b), du règlement de Bruxelles 1215/2012. Cela garantit qu’une décision JUB peut être reconnue et exécutée dans n’importe quel État membre de l’UE qui n’a pas ratifié l’accord JUB sans qu’il soit nécessaire de recourir à une procédure ou à une procédure spéciale. exequatur.
D’autre part, les sentences arbitrales de l’ACMA sont exécutoires conformément à la Convention de New York de 1958. sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères.
Le rôle de la JUP dans la recherche de décisions préjudicielles de la CJUE sur des questions de droit européen de la concurrence
Afin de garantir l’application uniforme du droit de l’UE lorsque son interprétation peut être ambiguë, la JUB est habilitée, en vertu de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), de l’article 21 de l’accord JUB et de la règle 266 de la JUB Règlement de procédure, pour demander une décision préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Ces décisions sont contraignantes pour la JUB, conformément au principe de primauté du droit de l’UE consacré à l’article 20 de l’accord JUB.
Ainsi, la capacité de la JUB de poser des renvois préliminaires à la CJUE est expressément prévue par l’Accord JUB, soulignant le rôle de la JUB en tant que juridiction commune aux États membres contractants. En tant que tel, il est tenu de respecter et d’appliquer le droit de l’UE.
En pratique, compte tenu de la nature imbriquée des droits de propriété intellectuelle (PI) et du droit de la concurrence, on peut s’attendre à ce qu’une grande partie des demandes de décision préjudicielle de la JUP concernent des questions de droit de la concurrence de l’UE (à savoir les articles 101 à 109 du TFUE).).
Droit de la concurrence de l’UE Implications pour les sentences arbitrales de l’ACGA
Si l’UPC est considérée comme une juridiction habilitée à soumettre des demandes de décisions préjudicielles à la CJUE en vertu de l’article 267 du TFUE, ce n’est pas le cas du PMAC. Les tribunaux PMAC, comme tous les tribunaux arbitraires, ne sont pas considérés comme des « tribunaux » au sens de l’article 267 TFUE. Cette limitation, soulignée par la CJUE Acmée l’arrêt, soulève des inquiétudes quant à son impact potentiel sur l’interprétation correcte du droit de la concurrence de l’UE.
La conséquence est claire : étant donné que les tribunaux arbitraux de l’ACMA ne peuvent pas demander à la CJUE l’interprétation correcte du droit de la concurrence de l’UE, l’exécution des sentences arbitrales de l’ACMA risque potentiellement d’être refusée pour des raisons d’ordre public. Dessins de l’Eco Swiss Dans le cas où la CJUE considère les dispositions du droit de la concurrence de l’UE comme des règles impératives parce qu’elles contiennent des principes fondamentaux pour le fonctionnement du marché intérieur, toute sentence arbitraire enfreignant ou contournant le droit de la concurrence de l’UE peut être considérée comme nulle pour des raisons d’ordre public.
Cette situation difficile met en avant trois prémisses :
1) Les tribunaux arbitraux du PMAC peuvent fréquemment être aux prises avec le droit de la concurrence de l’UE, étant donné l’interrelation inhérente entre la propriété intellectuelle et le droit de la concurrence, comme déjà mentionné ci-dessus.
2) Les tribunaux arbitraux de l’ACMA ne sont pas en mesure de demander des décisions préjudicielles à la CJUE, ce qui, à son tour, constitue une menace potentielle pour l’interprétation et l’application uniformes du droit de la concurrence de l’UE.
3) Les sentences arbitrales en violation du droit de la concurrence de l’UE font l’objet d’un contrôle accru et peuvent se voir refuser leur exécution pour des raisons d’ordre public au cours de la procédure d’exécution devant les tribunaux nationaux des États membres de l’UE.
Sur la base de ces trois hypothèses, les sentences arbitrales de l’ACGA peuvent se voir refuser l’exécution dans un grand nombre de cas. En effet, un débiteur peu coopératif peut opportunément présenter la violation du droit de la concurrence de l’UE comme un motif d’ordre public pour se soustraire aux obligations d’attribution devant les tribunaux nationaux dans le cadre des procédures d’exécution. La partie gagnante peut craindre que la partie perdante invoque une violation du droit de la concurrence de l’UE simplement pour que le prix soit annulé.
Solutions procédurales pour atténuer les risques
Pour se prémunir contre ce risque, l’ACGA pourrait envisager l’une des solutions suivantes :
1) Fixation directe: Le PMAC pourrait incorporer dans ses propres règles de procédure un article similaire à la règle 266 du règlement intérieur de l’UPC, offrant aux tribunaux arbitraux du PMAC la possibilité de demander une décision préjudicielle à la CJUE lorsque cela est nécessaire pour l’application uniforme du droit de l’UE. Le PMAC peut expressément le faire sur la base de l’art. 35(3) de l’Accord JUB qui déclare que « Le Centre [i.e. the PMAC] établira des règles de médiation et d’arbitrage.
Limitation: Même si les règles de procédure du PMAC incluaient une telle disposition, cela ne signifierait pas que la CJUE reconnaîtrait les tribunaux arbitraux du PMAC comme des « tribunaux » au sens de l’article 267 du TFUE.
2) Fixation indirecte: L’ACMA pourrait soumettre un renvoi préjudiciel à l’UPC qui serait alors celle qui demanderait une décision préjudicielle à la CJUE. Comme déjà mentionné ci-dessus, l’UPC dispose déjà de ce pouvoir. De plus, la règle 2 des règles de fonctionnement de l’ACGA prévoit expressément que le PMAC accomplit ses tâches en coopération avec l’UPC. Ainsi, dans ce cadre de coopération, le PMAC pourrait déléguer à l’UPC le soin de soumettre en son nom une demande de décision préjudicielle à la CJUE.
Inconvénient: Il ne s’agirait pas d’un processus simplifié et pourrait prolonger la durée des procédures d’arbitrage de l’ACGA.
3) Solution de correctifs: Lorsque la partie gagnante d’un arbitrage PMAC craint que la partie perdante puisse se soustraire à ses obligations en vertu d’une sentence PMAC au motif que le droit de la concurrence de l’UE n’a pas été appliqué correctement, le créancier de la sentence pourrait demander que le tribunal arbitral PMAC fasse confirmer sa sentence par le CUP. En joignant une ordonnance exécutoire UPC à la sentence arbitrale, celle-ci pourrait être protégée contre d’éventuelles contestations devant les tribunaux nationaux. Pour l’instant, cette procédure semble se limiter aux seules attributions par consentement. Cependant, l’UPC pourrait sans doute exercer ce pouvoir pour confirmer les sentences prononcées sans consentement. Plus précisément, l’UPC pourrait utiliser son pouvoir de bons offices en vertu de la règle 11(1) du Règlement intérieur de l’UPC pour explorer la possibilité de transformer le projet de sentence circulant entre les parties en un règlement.
Inconvénient: Cette solution transforme la sentence en jugement de justice, ce qui affecte la force exécutoire mondiale en vertu de la Convention de New York de 1958. Par conséquent, la partie gagnante doit choisir avec soin en fonction du lieu où elle envisage l’application de la loi. Il est préférable de confirmer l’attribution par l’UPC si l’application est attendue dans les États membres de l’UE, étant donné que le droit de la concurrence de l’UE ne fait partie de la politique publique qu’entre les États membres de l’UE. À l’inverse, si l’exécution est recherchée en dehors des frontières de l’UE, conserver la sentence arbitrale, plutôt que de la transformer en jugement d’un tribunal étranger, peut faciliter son exécution, dans la mesure où le droit de la concurrence de l’UE ne concerne pas les tribunaux nationaux de pays tiers.